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Chronique de Pierre Cannet pour Les Echos Executives

Sous l’effet du digital, le poste de directeur du marketing n’a cessé de se réinventer depuis les années 2000.

Aimez-vous les descentes en rafting le long d’une rivière au printemps, alimentée en eau glacée par la fonte des neiges ? Tantôt les rapides s’accélèrent lorsque les embarcations s’engagent entres deux parois rapprochées ; tantôt la rivière ressemble à un lac aux eaux calmes et le navigateur n’aperçoit plus les rives.

Depuis dix ans, le chief marketing officer (CMO), ou directeur du marketing, ne sait plus à quel saint se vouer : est-il pris par les rapides, menacé par le chief digital officer, diminué par le chief data officer ? Des entreprises aussi différentes et importantes que Carrefour ou AccorHotels ont, pendant plusieurs mois, évolué sans direction du marketing groupe.

Est-il augmenté par les territoires de la transformation digitale lorsqu’il prend en charge l’ensemble des leviers du marketing on line et le CRM ? Ainsi, au sein du groupe Eram, c’est le directeur du marketing, Renaud Montin, qui a pris le lead sur l’e-commerce pour l’enseigne, puis sur le digital groupe pour l’ensemble des enseignes.

De quel directeur du marketing les grands annonceurs ont-ils besoin ?

Il est loin le temps du directeur du marketing « proctérien » aux méthodologies immuables et à l’unique obsession : construire une marque et la faire briller grâce aux passages à la télé ! Le centre de gravité s’est déplacé d’un marketing de la marque et du produit vers un marketing du client et de l’usage. La dictature des grands médias s’est estompée au bénéfice d’une communication plurimédia, résolument digitale et de plus en plus personnalisée. On parle, depuis le début des années 2000, de la montée en puissance du marketing opérationnel, du marketing services ou du marketing client, trois concepts quasi synonymes.

La transformation digitale a accéléré ce déplacement et a densifié les expertises analytiques pour parler, recruter et fidéliser le client. Le CMO est donc avant tout, non pas diminué ou augmenté, mais transformé ; les entreprises ne recherchent pas un sachant ou un hyperexpert. Elles souhaitent embaucher un cadre de direction capable de surplomber les expertises, de garder une vue à 360 degrés sur la marque et ses expressions et de penser client et usages. Autrement dit, un chef d’orchestre susceptible de faire jouer ensemble de nombreux solistes et d’accueillir comme des frères les gourous de la data et du digital. Comme le fait Anne Browaeys au Club Med, elles n’hésitent pas à recruter des cadres issus du digital ou des « digital natives ».