Partagez :
FacebookLinkedInTwitter

Après avoir donné quelques conseils pour trouver son dream job dans le digital, Pierre Cannet, PDG de Blue Search Conseil, et Jean-Philippe Timsit, professeur en Stratégie Digitale à l’EM Lyon, se sont retrouvés lors d’une deuxième Masterclass, cette fois-ci à destination des dirigeants, managers et cadres RH : Comment trouver les meilleurs talents digitaux ?

Observations, analyse des tendances et quelques best practices sont au programme de cet échange passionnant, à retrouver en intégralité ici.

Ci-dessous, voici un compte rendu des sujets abordés et des réponses apportées :

Comment les entreprises identifient-elles leurs besoins en talents digitaux ?

Pour les entreprises, le digital représente un enjeu économique et stratégique, de transformation ou d’évolution du business model, avant d’être un changement de paradigme ou de répondre à un effet de mode.

La nature du besoin fait qu’elles recherchent des profils à même de les accompagner dans cette transformation et qui sauront créer de la valeur pour l’entreprise. Bien souvent, ce besoin se traduit par la recherche d’une compétence spécifique qui n’existait alors pas dans l’organisation.

Entre 60 et 70% des sollicitations auxquelles les cabinets de recrutement spécialisés dans le digital répondent correspondent à des besoins nouveaux : création de nouvelles fonctions, d’un nouveau métier, quel rattachement leur donner… car beaucoup d’entreprises éprouvent des difficultés à définir leurs propres besoins.

Comment rémunère-t-on un cadre du digital dans une entreprise en transformation ?

Un cadre digital sera mieux payé et plus tôt dans sa carrière qu’un cadre dit « non digital ». Cela a pu être un obstacle pour les entreprises, du moins au début, qui doivent remettre en question les équilibres salariaux dans leur organisation.

Aujourd’hui, on constate cependant que la plupart des acteurs ont pris conscience que l’effet de pénurie des compétences entraîne inévitablement un effet de surenchère, et qu’ils sont prêts à faire des exceptions car ils s’exposent au risque de ne pas recruter. L’enjeu n’est pas de remplir une case, mais de trouver au cadre digital une place dans l’organisation qui le mettra dans les meilleures dispositions pour répondre au besoin de l’employeur.

Quel est le profil d’une entreprise qui recrute dans le digital aujourd’hui ?

Chaque année voit de nouvelles générations d’entreprise émettre des besoins en compétences digitales. Dernièrement, les ETI sont parmi les acteurs qui recrutent le plus et déclenchent tous les jours de nouvelles créations de fonctions.

Les grands groupes qui ont très tôt vus la nécessité de prendre ce virage voient leurs besoins évoluer. Les fonctions digitales sont bien définies et les postes clés occupés, les recrutements vont principalement constituer des remplacements et sont donc moins fréquents.

Les petites et moyennes entreprises, avec leurs moyens plus réduits et des besoins plus spécifiques, vont privilégier les prestataires externes comme les agences digitales.

Parmi les secteurs où les talents digitaux sont le plus demandés, on trouve celui de la santé (pharmacie, hôpitaux ; crise Covid oblige), le retail, les start-ups, le luxe ou encore l’industrie qui devient un acteur de plus en plus présent dans le digital, notamment en matière d’e-procurement et de plateformes e-commerce.

Les compétences digitales sont-elles toutes en pénuries ?

Il y’a une pénurie massive, mais pas générale. Parmi les compétences les plus recherchées (mais aussi les plus dures à trouver), on trouve notamment les métiers de la Data, les fonctions IT, les profils e-commerce / e-retail et aussi le marketing online.

Comment travaille-t-on avec un DRH qui n’a pas été formé au digital ?

Accompagner une entreprise sur le digital ne signifie pas expliquer à l’entreprise ce qu’elle doit chercher. Recruteurs et DRH ont beaucoup de choses à s’apprendre et doivent chacun se remettre en cause.  

Le recruteur apporte son expertise des compétences digitales et des tendances du marché, tandis qu’un DRH aura une bien meilleure vision des valeurs et de la stratégie de l’entreprise.

Comment fait-on évoluer ses compétences dans le digital ?

Dans le digital, on se forme avant tout prenant le bâton de pèlerin et en allant sur le terrain, à la rencontre des homologues, des prestataires, des start-ups, des acteurs moteurs du marché. Pas seulement grâce aux parcours de formation proposés par l’employeur.

Aujourd’hui, il y’a un « combat de titans » sur le marché entre disrupteurs et disruptés. Et ce sont les disrupteurs qui font bouger les lignes.

Existe-t-il une peur du digital dans certaines organisations ou secteurs ?

La crainte est naturelle, l’anxiété existera toujours. Surtout pour une entreprise qui doit se confronter à une transformation de son modèle économique.

Pour les cadres, il s’agira de mettre à jour leurs compétences voire à se reconvertir. Pour les diplômés, il s’agira de trouver le premier job qui leur permettra d’évoluer naturellement dans un marché qui évolue à grande vitesse. Pour une DSI, il faudra s’adapter à de nouveaux processus, à de nouvelles solutions, à d’autres architectures…

Les citadelles existent, mais elles ne sont pas imprenables, car il y’a toujours une raison business qui pousse les entreprises à se transformer et les cadres à se reconvertir.

Qu’en est-il des profils qui ne viennent pas de l’univers digital mais qui peuvent apporter une valeur ajoutée ?

Le digital ce n’est pas seulement l’appel des techniciens, des informaticiens ou des spécialistes des données chiffrées. Les recruteurs doivent aussi être en mesure de reconnaître la valeur qu’un candidat peut apporter avec son expérience plutôt qu’avec ses hard skills.

Ainsi, on recrute dans le digital des littéraires, des créatifs, des commerçants, des scientifiques… Les entreprises ont besoin de profils à même de comprendre la donnée et les consommateurs autrement que comme de simples données chiffrées. Elles ont besoin d’études qualitatives autant que d’études quantitatives. Les profils qui ne sont pas digital natives sont eux-aussi capables de comprendre le parcours client, l’UX / UI, les produits, etc.  

Quel discours face à une entreprise qui pense avoir tout compris du digital ?

Le conseil en recrutement et en organisation sera surtout attendu sur les besoins nouveaux tels que les créations de poste, où les entreprises vont avoir du mal à bien définir les contours de leur job desc.

Pour les missions de remplacement, l’entreprise sait déjà ce qu’elle recherche et la job desc est généralement bien définie. Mais on va quand même la challenger…

Sur les moyens : quelle rémunération pour les postes N-1 éventuels ? Quel budget pour les prestataires ? La DSI a-t-elle a sa disposition toutes les ressources nécessaires ?

Sur les KPIs : quels indicateurs ? Quantitatifs ou qualitatifs ? Quels objectifs, individuels et collectifs ?

L’objectif d’un recrutement, c’est de répondre à un besoin qui lui-même saura répondre à de nouveaux besoins.  

Il n’y a pas que les compétences digitales qui pèsent dans la balance du recrutement, mais tout ce qu’il y’a autour. Il faut surveiller les gaps culturels, les écarts de valeurs entre candidats et employeurs qui peuvent se transformer en erreurs de casting. De la même manière, une entreprise qui n’aura pas su affronter ses craintes ne pourra pas répondre de la meilleure des manières à ses besoins.

Pour réussir un recrutement dans un contexte de transformation digitale, une entreprise doit bien définir son nouveau modèle économique et réussir la conduite du changement, ce qui lui permettra d’obtenir l’évolution organisationnelle recherchée.